La fête, ça se fête !

Publié le par DanyDan

C'est ce que me disait un joyeux luron rencontré dans un bar pas plus tard que l'autre soir.

Ca faisait juste cinq minutes que j'étais accoudé au comptoir et voilà t-y pas qu'une main charnue s'abat sur mon épaule; fort ému, je sursaute et me retourne prêt à bondir pour punir l'impudent; mais celui-ci a déjà entrepris de me postilloner au visage en vociférant : "la fête, ça se fête !".

Encore un peu grincheux du coup d' il y a cinq secondes, je me sens malgré tout obligé de répondre; après tout, je suis un garçon bien élevé : "Oui, mais pas avec n'importe qui et pas n'importe comment !".

Que n'avais-je pas dit !

Ce fut le coup d'envoi, le signal de départ; le coquin n'attendait plus que ça:  la répartie.  Qu'importe la phrase ou le mot lancé, il serait là !  Prêt à répondre sur tout et n'importe quoi. Il avait envie de parler et ma foi, je faisais bien l'affaire à ce  moment-là !

Il aurait pu jeter son dévolu sur la trentenaire qui sirotait son whisky à ma gauche tout en téléphonant, fort bruyament d'ailleurs : "Tu te rends compte ! Il a osé me répondre que je n'avais qu'à m'organiser...Heureusement que j'ai gardé mon calme, sinon je le crevais !". Hé oui, même les jeunes femmes d'aujourd'hui en ont dans la culotte !

C'est à elle que le casse-pieds aurait dû lancer son affirmation, c'aurait été sa fête, ça ouiche !

En attendant, il avait entrepris de m'expliquer qu'il avait gagné au Loto et malgré le peu d'intérêt que suscitaient en moi ses explications, je comprenais mieux maintenant la teneur de sa phrase fétiche : "la fête ça se fête !".

La fête: c'était gagner au loto. Quand je gagne au loto, c'est la fête ! c'est la joie ! Tout peut arriver, j'ai gagné.

Et évidemment, réthorique imparable, quand on gagne on fait la fête; la fête ça se fête !

Oui finalement, en ce bas monde, il y a une logique à tout...et le loto et la notion de fête n'échappent pas, eux aussi, à ce grand Tout.

Cinq "Cointreau" plus tard, j'avais d'ailleurs déjà digéré l'absolue vérité de l'argument. Mon verre était en train d'entrechoquer gaiement le verre du sexagénaire à ma droite dont la casquette penchait dangereusement alors qu'il essayait de sourire de ses deux dents.... "La fête, ça se fête !"

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Pas de doute ! Les billets que le lascar pensionné du Loto avait généreusement brandis et jetés sur le comptoir avaient allumé en nous un vrai désir de fraternité.

On parle souvent d'assomoirs quand on décrit  les débits de boisson, mais on oublie aussi la franche camaraderie qui peut résulter de l'absorption des dites boissons.
Le voisin de gauche devient un témoin, un interlocuteur attentif, un frère et non plus l'inconnu qui quelques minutes avant vous observait à la dérobée avec circonspection...
Le voisin de droite peut vous taper sur l'épaule à grand renfort de "c'est drôle, non ?",  vous ne sentez plus rien sinon le frisson de l'amitié parcourir votre dos que vous faites rond.

Mais c'est aussi un peu comme dans les contes de fées, un peu comme dans Cendrillon. Tout finit par avoir une fin, et arrive le moment où vos charmants voisins se transforment en vieux pochtrons.
Dans le meilleur des cas, vous rentrez à pied,  du vent dans les voiles, la démarche flageolante, et l'envie de refaire le monde et de mener à bien tous les projets que vous remettez aux calendes grecques depuis longtemps.
Les réflexions en solitaire, ça peut séduire un imbécile, surtout quand il est bourré !

C'est d'ailleurs comme ça que je suis rentré chez moi ce soir-là...

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Publié dans Du vécu !

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